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3 Juillet 2025
SANB : immigration et francophonie font débat lors de l’assemblée générale annuelle
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Jean-Marie Nadeau a constaté que des immigrants, majoritairement originaires de l’Inde, qui s’installent au sud-est et dans le comté de Kent, ne peuvent offrir le service en français dans les commerces où ils travaillent. Samedi 21 juin, lors de l’assemblée générale annuelle de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB) dont il fut jadis le président, il a présenté une proposition de résolution qui a été longuement débattue. Il souhaite également que le portrait linguistique des municipalités du Nouveau-Brunswick soit défini par la loi.
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Damien Dauphin
IJL – Réseau.Presse – Le Moniteur Acadien
Le chroniqueur sociopolitique du Moniteur acadien s’inquiète des menaces que fait peser une immigration non francophone sur le portrait linguistique traditionnel des municipalités acadiennes. Il a proposé que des cours de français gratuits et obligatoires soient offerts aux nouveaux arrivants unilingues anglophones, de même que des cours sur l’histoire acadienne.
«Je veux que ces gens se sentent réellement bienvenus chez nous et intégrés, a-t-il justifié. Mais il faut qu'on leur donne les moyens de s'intégrer. Tel est le sens de ma proposition. L'important, c'est d'alerter et d'essayer d'identifier un moyen de pérennisation du peuple acadien.»
Président du conseil d’administration du Centre d’accueil et d’accompagnement francophone des immigrants au Nouveau-Brunswick (CAFi), Marcel Goguen a signalé que pour qui veut prendre des cours de langue, les listes d’attentes sont très longues. Il ne croit pas que la SANB ait elle-même les fonds nécessaires pour financer des cours gratuits. En outre, selon ses calculs, les immigrants concernés devraient y consacrer 1000 à 1500 heures réparties sur deux ans.
«Il existe des programmes provinciaux. Éducation postsecondaire, Formation et Travail offre des cours qu'on appelle des formations en compétences essentielles au travail. La langue peut être une compétence essentielle. Je pense qu'il faut encourager les employeurs qui embauchent ces gens-là à leur offrir peut-être quelques heures par semaine», a-t-il suggéré.
Représentante de la région Sud-Est au sein du conseil d’administration de la SANB, Alexandra LeBreton a demandé que soit retirée la mention «obligatoire» dans l’énoncé de la résolution.
«Est-ce qu'on peut forcer quelqu'un qui parle déjà une des deux langues officielles, par exemple l'anglais, à prendre des cours, puis investir, comme M. Goguen vient de le dire, 1 500 heures et plus là-dedans?», s’est-elle interrogée.
Des « voleurs de jobs »
Présidente de la Commission des droits de la personne du Nouveau-Brunswickoise, Philomène Zangio a quitté le Zaïre (aujourd’hui, la République démocratique du Congo) pour s’établir au Canada il y a une trentaine d’années. En devenant Canadienne, elle a perdu ipso facto sa nationalité congolaise car son pays natal ne reconnaît pas la binationalité.
Son parcours fut semé d’embûches. Mme Zangio, qui se définit comme allophone, a fait le choix de vivre en français mais, au moment de son arrivée, les immigrants francophones étaient dirigés chez MAGMA (association multiculturelle du Grand Moncton) où tout se passe en anglais. En outre, elle signale que les personnes d’ascendance africaine n’étaient pas forcément les bienvenus auprès des Acadiens.
«Nous étions des voleurs de jobs, nous n'étions pas acceptés et lors des assemblées, je pense que nous n’avions même pas de place comme immigrants francophones.»
Philomène Zangio se félicite que la situation ait changé, mais s’est dite préoccupée par la proposition dans la mesure où beaucoup de nouveaux arrivants viennent de pays où l’anglais et le français ne sont pas les premières langues officielles. Elle y voit un possible dérapage et une atteinte au multiculturalisme.
«Si cette proposition passait aujourd'hui, allez-vous la faire seulement pour les immigrants ou allez-vous la faire aussi pour les Acadiens qui ne parlent pas le français? Pourquoi cette proposition va être attachée à l'immigrant? Nous avons une langue à protéger, mais je pense que nous pouvons la protéger d’une autre façon», a-t-elle exprimé avec passion.
Enseigner l’anglais plutôt que le français aux nouveaux arrivants
Jeanne d’Arc Gaudet a suggéré que des cours soient offerts pendant la saison hivernale aux travailleurs saisonniers qui sont alors sur l’assurance-emploi.
«J’ai eu la chance de discuter avec ces personnes-là de façon régulière, a fait valoir l’ancienne présidente de la SANB, et elles aimeraient pouvoir communiquer aussi en français. Je crois qu’il faut agir et vraiment réfléchir à cette question-là.»
Le président du CAFi a ensuite repris la parole pour émettre une suggestion qui peut sembler a priori paradoxale. Il a déclaré que les immigrants du Maghreb et de l’Afrique subsaharienne qui ont le français comme langue seconde devraient plutôt se voir offrir des cours dans la langue de Shakespeare.
«S'ils ont de la difficulté, surtout dans le sud-est, à trouver de l'emploi ou à se faire embaucher par un employeur, il faut qu'ils apprennent l'anglais.»
Un peu plus tôt, Jean-Marie Nadeau avait présenté une première résolution afin que la SANB milite pour l’adoption d’une loi omnibus qui définisse le caractère linguistique de chacune des 77 municipalités ainsi que celui des 12 districts ruraux de la province. Selon cette optique, les communautés visées pourraient être soit acadiennes et francophones, soit anglophones, soit bilingues.
Dans l’ensemble, ce sont les plus jeunes membres de la SANB qui en ont critiqué la pertinence. In fine, la proposition a été reportée sine die dans l’attente de recueillir davantage d’informations sur le sujet.
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Damien Dauphin
IJL – Réseau.Presse – Le Moniteur Acadien
Le chroniqueur sociopolitique du Moniteur acadien s’inquiète des menaces que fait peser une immigration non francophone sur le portrait linguistique traditionnel des municipalités acadiennes. Il a proposé que des cours de français gratuits et obligatoires soient offerts aux nouveaux arrivants unilingues anglophones, de même que des cours sur l’histoire acadienne.
«Je veux que ces gens se sentent réellement bienvenus chez nous et intégrés, a-t-il justifié. Mais il faut qu'on leur donne les moyens de s'intégrer. Tel est le sens de ma proposition. L'important, c'est d'alerter et d'essayer d'identifier un moyen de pérennisation du peuple acadien.»
Président du conseil d’administration du Centre d’accueil et d’accompagnement francophone des immigrants au Nouveau-Brunswick (CAFi), Marcel Goguen a signalé que pour qui veut prendre des cours de langue, les listes d’attentes sont très longues. Il ne croit pas que la SANB ait elle-même les fonds nécessaires pour financer des cours gratuits. En outre, selon ses calculs, les immigrants concernés devraient y consacrer 1000 à 1500 heures réparties sur deux ans.
«Il existe des programmes provinciaux. Éducation postsecondaire, Formation et Travail offre des cours qu'on appelle des formations en compétences essentielles au travail. La langue peut être une compétence essentielle. Je pense qu'il faut encourager les employeurs qui embauchent ces gens-là à leur offrir peut-être quelques heures par semaine», a-t-il suggéré.
Représentante de la région Sud-Est au sein du conseil d’administration de la SANB, Alexandra LeBreton a demandé que soit retirée la mention «obligatoire» dans l’énoncé de la résolution.
«Est-ce qu'on peut forcer quelqu'un qui parle déjà une des deux langues officielles, par exemple l'anglais, à prendre des cours, puis investir, comme M. Goguen vient de le dire, 1 500 heures et plus là-dedans?», s’est-elle interrogée.
Des « voleurs de jobs »
Présidente de la Commission des droits de la personne du Nouveau-Brunswickoise, Philomène Zangio a quitté le Zaïre (aujourd’hui, la République démocratique du Congo) pour s’établir au Canada il y a une trentaine d’années. En devenant Canadienne, elle a perdu ipso facto sa nationalité congolaise car son pays natal ne reconnaît pas la binationalité.
Son parcours fut semé d’embûches. Mme Zangio, qui se définit comme allophone, a fait le choix de vivre en français mais, au moment de son arrivée, les immigrants francophones étaient dirigés chez MAGMA (association multiculturelle du Grand Moncton) où tout se passe en anglais. En outre, elle signale que les personnes d’ascendance africaine n’étaient pas forcément les bienvenus auprès des Acadiens.
«Nous étions des voleurs de jobs, nous n'étions pas acceptés et lors des assemblées, je pense que nous n’avions même pas de place comme immigrants francophones.»
Philomène Zangio se félicite que la situation ait changé, mais s’est dite préoccupée par la proposition dans la mesure où beaucoup de nouveaux arrivants viennent de pays où l’anglais et le français ne sont pas les premières langues officielles. Elle y voit un possible dérapage et une atteinte au multiculturalisme.
«Si cette proposition passait aujourd'hui, allez-vous la faire seulement pour les immigrants ou allez-vous la faire aussi pour les Acadiens qui ne parlent pas le français? Pourquoi cette proposition va être attachée à l'immigrant? Nous avons une langue à protéger, mais je pense que nous pouvons la protéger d’une autre façon», a-t-elle exprimé avec passion.
Enseigner l’anglais plutôt que le français aux nouveaux arrivants
Jeanne d’Arc Gaudet a suggéré que des cours soient offerts pendant la saison hivernale aux travailleurs saisonniers qui sont alors sur l’assurance-emploi.
«J’ai eu la chance de discuter avec ces personnes-là de façon régulière, a fait valoir l’ancienne présidente de la SANB, et elles aimeraient pouvoir communiquer aussi en français. Je crois qu’il faut agir et vraiment réfléchir à cette question-là.»
Le président du CAFi a ensuite repris la parole pour émettre une suggestion qui peut sembler a priori paradoxale. Il a déclaré que les immigrants du Maghreb et de l’Afrique subsaharienne qui ont le français comme langue seconde devraient plutôt se voir offrir des cours dans la langue de Shakespeare.
«S'ils ont de la difficulté, surtout dans le sud-est, à trouver de l'emploi ou à se faire embaucher par un employeur, il faut qu'ils apprennent l'anglais.»
Un peu plus tôt, Jean-Marie Nadeau avait présenté une première résolution afin que la SANB milite pour l’adoption d’une loi omnibus qui définisse le caractère linguistique de chacune des 77 municipalités ainsi que celui des 12 districts ruraux de la province. Selon cette optique, les communautés visées pourraient être soit acadiennes et francophones, soit anglophones, soit bilingues.
Dans l’ensemble, ce sont les plus jeunes membres de la SANB qui en ont critiqué la pertinence. In fine, la proposition a été reportée sine die dans l’attente de recueillir davantage d’informations sur le sujet.