Opinion
Les origines de l’Université acadienne du Nouveau-Brunswick
Au XIXe siècle, aussitôt qu’à partir de 1832, il y a 192 ans, nos ancêtres ont fait quelques tentatives infructueuses de créer des collèges universitaires. Après quelques années d’existence ces institutions durent fermer leurs portes pour des motifs financiers, puisque la communauté acadienne n’avait pas les ressources financières suffisantes pour en assurer la pérennité. La vérité historique impose aussi de dire que les diocèses où vivaient les Acadiens étaient sous l’égide d’évêques irlandais ou anglophones, ce qui imposait de sérieux défis aux communautés religieuses fondatrices de langue française.
La formation universitaire pérenne, en Acadie du N.-B., remonte à 1864, trois ans avant la Confédération canadienne. Le premier collège acadien au Canada Atlantique fut créé par les Pères Sainte-Croix sous le nom de Collège St-Joseph, dirigé par le père Camille Lefebvre. Ce collège avait un statut bilingue, imposé par Mgr. Sweeney, évêque de Saint John. Ce collège universitaire reçut sa charte universitaire dans les années 1880 lui donnant tous les droits et statuts d’une université. Déménagée à Moncton, elle fut fusionnée pour établir l’Université de Moncton en 1963.
Le deuxième collège fut fondé à Caraquet, en 1899, sous le nom de Collège du Sacré-Cœur, à l’initiative du curé Allard. Celui-ci utilisa un subterfuge pour lui fournir un toit, en prétendant bâtir un presbytère puisque l’évêque Mgr. Rogers, s’opposait à son projet. Mgr. Allard en confia la direction aux pères eudistes. Celui-ci fut déménagé à Bathurst suite à un incendie en 1914. Il reçut sa charte universitaire dans les années 1920 et bénéficia de tous les droits et obligations d’une université. Elle fut fusionnée à l’Université de Moncton en 1963.
La troisième université fut celle de Saint-Louis à Edmundston, fondée par les pères eudistes en 1946. Les premières années de son existence, ses locaux furent installés dans des baraques militaires. Cette institution avait aussi une charte universitaire et un collège affilié féminin (Collège Maillet à Saint Basile) En 1963, l’Université était connue comme Université St-Louis Maillet. Elle abandonna sa charte universitaire pour se fusionner à l’Université de Moncton.
Ces trois universités fusionnées devinrent la base des premières facultés de la nouvelle université et leur personnel fut intégré dans l’un ou l’autre des trois campus, soit comme enseignants-chercheurs, cadres ou personnel administratif ou de soutien.
Les trois institutions à charte universitaire avaient des collèges affiliés. Notons en particulier les collèges féminins : Notre Dame d’Acadie à Moncton fondé en 1943, le Collège Maillet à Saint-Basile fondé en 1949, le Collège Jésus-Marie de Shippagan fondé en 1959 et le Collège Maria Assumpta à Bathurst fondé en 1961.
Que peut-on retenir de ces éléments historiques?
D’abord, l’Acadie du Nouveau-Brunswick a établi une fonction universitaire qui remonte à près de deux cents ans. Celle-ci a été créée par le peuple acadien face à de nombreux défis et d’immenses difficultés, avec la connivence des communautés religieuses.
Les noms de ces institutions reflétaient leur caractère francophone et acadien. Elles étaient privées et confessionnelles.
Quand on dit que les fondateurs de l’Université de Moncton sont Louis J. Robichaud et Clément Cormier, je crois que ce n’est pas totalement fondé historiquement. Il semble qu’on devrait reconnaître que c’est que le peuple acadien qui a fondé, contre vents et marées, ses collèges et universités. Le courage politique et le mérite de Louis-J. Robichaud a été de restructurer la fonction universitaire en Acadie, de la moderniser et de lui donner son caractère public. Ceci lui a permis d’obtenir un financement stable et équitable sur le même pied d’égalité que les autres universités du pays. Ce n’est pas rien et l’Acadie lui doit beaucoup. Comme geste de reconnaissance, notre université, fière héritière de cette longue tradition, ne devrait-elle pas lui ériger un monument, en compagnie de celui du recteur fondateur, sur le campus de Moncton?
Étant donné ce bref résumé des origines historiques de notre université, la revendication pour un changement de nom est pleinement justifiée.
Jean-Bernard Robichaud
Gatineau