Éditorial

Soyons unilingues francophones !


Damien Dauphin
Rédacteur en chef
damien@moniteuracadien.ca


Avez-vous eu l’occasion d’aller voir au cinéma « Ticket to Paradise », la dernière comédie romantique mettant en vedette Julia Roberts et George Clooney ? Écoutez bien le jeune acteur qui interprète l’amoureux balinais de la fille des personnages principaux. Son anglais est impeccable.

On ne devinerait jamais que ce jeune homme, d’ascendance indonésienne par sa mère, est un acteur français qui s’appelle Maxime Bouttier et qu’il est né à Poitiers. Il doit donc parler français de la même façon que moi, et il est même trilingue puisqu’il maîtrise la langue de ses ancêtres maternels.

Les anglophones qui, au Canada et au Nouveau-Brunswick, refusent d’apprendre l’autre langue officielle du pays et de la province, au motif que ce serait trop difficile, n’ont aucune excuse.

En parlant de cinéma, le documentaire de Phil Comeau sur l’ordre de Jacques-Cartier m’a appris que, des années 1930 aux années 50, il était mal vu que des gens se parlent en français à Moncton (et peut-être aussi ailleurs dans la région). En d’autres mots, pour appeler les choses par leur nom, les francophones du Nouveau-Brunswick étaient des citoyens de seconde zone comme les afro-américains du sud des États-Unis à la même époque.

À chacun son mouvement d’émancipation pour les droits civiques les plus élémentaires ! Dans les années 60, les Acadiens ont gagné le droit de vivre et de se faire servir dans leur langue. Un demi-siècle plus tard, ces acquis sont battus en brèche par une bande de frustrés, nostalgiques d’un temps où leurs grands-parents régnaient sans partage sur la province.

Soyons clairs : Blaine Higgs et Kris Austin ont sournoisement déclaré la guerre aux Acadiens et aux francophones. Ne les laissons pas la gagner. Ne commettons pas non plus l’erreur de croire qu’ils représentent les valeurs du Parti progressiste-conservateur tel que l’ont incarné Richard Hatfield et Bernard Lord.

Comme l’a si bien dit le député de Kent-Nord Kevin Arseneau, c’est la CoR et la People’s Alliance qui, à travers le premier ministre de Quispamsis et son petit protégé de Minto, ont infiltré la majorité gouvernementale pour y faire triompher leurs idées rétrogrades.

Nous ne sommes plus au temps où La Patente travaillait en coulisses, sous le sceau du secret, pour donner aux francophones leur juste place dans la société civile. Défions ouvertement ce tandem cacochyme aux habiletés linguistiques restreintes !

Pour commencer, exigeons de nos députés acadiens que, désormais, ils ne s’expriment plus qu’en français, et seulement en français, dans l’enceinte de l’Assemblée législative. Sachez qu’il y a dans ce vénérable édifice parlementaire des employés dont c’est précisément le rôle d’offrir la traduction simultanée aux élus souffrant de déficience duo-linguistique.

Chaque fois qu’un député francophone s’exprime en anglais devant ses pairs, il y a un employé qui est payé à ne rien faire ! Si cela continue, il viendra un moment où ces emplois seront abolis car jugés inutiles mais, contrairement aux caissiers des supermarchés, ils ne seront pas remplacés par des machines pour faire le travail.

À présent, il nous revient à nous aussi de faire notre part. Faisons-la avec subtilité. Dans nos interactions quotidiennes avec les commerçants et les employés du secteur des services, n’exigeons plus le service en français, mais prenons pour acquis que la personne avec qui nous discutons est bilingue. Même si elle ne l’est pas, la communication est possible. Je vous en donne un exemple.

Samedi dernier, je suis allé acheter une ampoule dans une quincaillerie et me suis exprimé en français. Plein de bonne volonté, l’employé m’a dit : « I don’t speak French but I can understand it ». Alors, si un employé ne comprend pas le français, c’est son problème et celui de son employeur qui devra prendre les mesures nécessaires pour accommoder la clientèle francophone. Ce n’est pas à nous d’accommoder les anglophones, c’est l’inverse !

Chaque fois que nous faisons le choix de parler en anglais dans nos interactions sociales – y compris entre francophones ! – nous sabotons le navire sur lequel nous voguons vers des rivages dangereux et justifions du même coup les attaques de ceux qui voudraient revenir 100 ans en arrière. En d’autres termes, comportons-nous comme des unilingues francophones !

Le seul compromis que nous puissions faire se situe au niveau de notre communication avec les prestataires de services de soins de santé, et encore, uniquement en cas d’urgence absolue et vitale. Dans ce cas seulement, nous n’accommodons pas les anglophones mais prenons les mesures nécessaires qui pourraient nous sauver la vie ou celle de nos proches.

Hormis ce cas particulier que nous pourrions qualifier de « clause nonobstant », pour tout le reste, faisons en sorte que ce soit EN FRANÇAIS SEULEMENT.

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