Damien Dauphin
Il y a deux semaines, Le Moniteur Acadien a expliqué les raisons pour lesquelles il lui semblait que Susan Holt représentait le meilleur choix pour diriger le Parti libéral. Nous sommes évidemment satisfaits du résultat du vote. Nous n’avons pas la prétention d’y avoir contribué de manière décisive, mais si nous avons pu ajouter notre pierre à l’édifice, il va de soi que nous en sommes heureux.
Si notre éditorial fut généralement bien reçu, certains s’en sont émus, allant même jusqu’à prétendre, apparemment, que nous n’avions pas le droit de prendre ainsi position. Qu’il me soit permis de leur dire respectueusement qu’ils se trompent. Non seulement nous en avons le droit, mais c’est aussi notre devoir.
Dans le système de Westminster, les prérogatives du souverain, telles que définies par Walter Bagehot en 1867, se limitent à trois : être consulté (donc, donner son avis), encourager et mettre en garde. Au-delà de son travail informatif, le rôle de la presse est, par analogie, sensiblement le même que celui de la reine : elle ne fait pas autre chose à travers un éditorial.
Par conséquent, nous avons le droit et le devoir d’émettre une opinion, d’adresser des félicitations quand elles sont méritées, et d’admonester lorsque l’occasion s’en fait sentir. Vous pouvez compter sur Le Moniteur Acadien pour remplir ce rôle en toute connaissance de cause et de façon non partisane.
Pour en revenir à Susan Holt, il nous semble de bon augure qu’elle ait manifesté sans ambigüité son désir de travailler en collaboration avec les parties prenantes. Nous en prenons bonne note. Nul n’a la science infuse, et l’époque des systèmes pyramidaux au sein desquels tout se décide urbi et orbi au sommet de l’édifice devrait être révolue.
À la tête du Parti libéral, elle va devoir susciter une véritable émulation. Figure de proue, il ne lui s’agira pas tant de réunir auprès de sa personne que de fédérer les acteurs communautaires autour des principes qui doivent guider l’action de sa formation politique. La porte doit désormais être ouverte à un renouvellement : non seulement au niveau des pratiques, mais aussi au niveau des personnes. Afin de rassembler pour gagner, il ne faut pas hésiter à sortir des sentiers battus.
Ces deux dernières années, le PLNB a démontré son ouverture d’esprit. Il est inclusif. Deux élus peuvent en témoigner. Sur la scène fédérale, il a accueilli Jenica Atwin. La députée de Fredericton venait du Parti Vert. Au niveau provincial, Robert Gauvin a quitté, avec un éclat mémorable, un gouvernement progressiste-conservateur dont il fut le dernier vice-premier ministre. Samedi dernier, devant les militants libéraux, il est revenu sur cet épisode de son parcours.
« Nous avons une grande qualité au sein du Parti libéral : c’est l’inclusion. Moi-même, j’ai été accepté par le Parti libéral à bras ouverts. » Tels sont les mots qu’il a prononcés.
Le député de Baie-de-Shediac-Dieppe a d’indéniables qualités de tribun. Celles-ci constituent un atout pour le Parti libéral. Candidat-vedette des bleus en 2018, il y représentait une erreur de casting. Depuis qu’il a retrouvé sa liberté de parole et franchi le plancher, il est dans son véritable élément, capable de défendre ce en quoi il croit.
C’est pourquoi il nous semblerait logique que lui soit confié, le temps que Susan Holt soit élue elle-même députée, le rôle de chef de l’opposition parlementaire. Celle-ci a besoin d’un porte-parole qui sache enflammer les débats pour leur donner le relief nécessaire. Ce serait d’autant plus pertinent que, parmi les dossiers brûlants, la santé est précisément celui qui a incité Robert Gauvin à franchir le Rubicon en 2020.
Notre démocratie a besoin d’un souffle nouveau. Nous avons invité notre lectorat à choisir l’alternance. C’est chose faite, et le Parti libéral du Nouveau-Brunswick a toutes les raisons de croire en l’avenir. Pour l’incarner, il doit aussi se souvenir des erreurs du passé pour ne pas les répéter. Nous l’espérons dorénavant entre de bonnes mains.