Éditorial

L’avenir progressiste des conservateurs


Damien Dauphin
damien@moniteuracadien.ca


Ça bouge à Fredericton ! Si le 13 octobre était tombé un vendredi plutôt qu’un jeudi, des astrologues auraient pu se livrer à des calculs alambiqués pour prédire les conséquences de ce qui s’est passé ce jour-là dans la capitale provinciale.

Nous n’allons pas revenir sur les circonstances de la démission fracassante et spectaculaire de Dominic Cardy, dont nos confrères de la presse écrite et radiotélévisée ont déjà abondamment parlé. Attardons-nous plutôt sur la perception que ce claquage de porte a laissée. Une chroniqueuse de l’Acadie Nouvelle, dont les convictions sont visiblement à l’opposé de celles de la droite conservatrice, s’est déclarée « extatique de voir que l’on retrouve le politicien fougueux et authentique que l’on connaissait de son temps au NPD ». J’espère qu’elle ne sera pas déçue d’apprendre que M. Cardy n’a nullement l’intention de revenir en arrière pour tenter de redresser un parti en déshérence. Son avenir est plutôt au centre-droit, c’est-à-dire, ce que doit normalement être le parti progressiste-conservateur qui, sous la houlette de Blaine Higgs, semble avoir relégué sa dimension progressiste aux oubliettes.

Exclu du caucus de sa formation politique dès le lendemain de son départ hautement médiatisé, Dominic Cardy n’en demeure pas moins député de Fredericton-Ouest-Hanwell et, qu’on se le dise, membre en règle du PCNB. Pour l’en exclure, il faudrait que quelqu’un enclenche un processus assez complexe qui a peu de chances d’aboutir, dans la mesure où il faudrait réunir au sein des instances du parti une majorité de 80% de votants en faveur de son expulsion.

L’ancien ministre de l’Éducation a maintenant le plus beau rôle. En siégeant dorénavant comme indépendant dès la rentrée parlementaire, il retrouve sa liberté de parole. L’expérience nous enseigne qu’il ne devrait pas se priver d’en faire usage. En outre, il incarne à présent la meilleure alternative des bleus face à un premier ministre au bord de l’usure du pouvoir et qui se laisse de plus en plus aller à ses mauvais instincts. La nomination de Kris Austin au gouvernement en est une preuve supplémentaire.

À cet égard, tournons-nous un instant vers les libéraux. L’actuel chef de l’opposition parlementaire, Rob McKee, a déclaré que la promotion de cet opposant notoire au bilinguisme officiel posait la question du maintien de Daniel Allain et de Réjean Savoie (lui aussi promu ministre) au sein du gouvernement. Ne nous laissons pas emporter par nos émotions. Il n’est pas dans l’intérêt des Acadiens que leurs seuls représentants détalent comme des lapins suite à ce remaniement. Ce serait du plus mauvais effet. Les francophones doivent être présents dans toutes les formations politiques (il y en avait même dans l’Alliance des gens !).

Pour couronner le tout, voici que la nouvelle cheffe Susan Holt s’est dite intéressée par la circonscription de Dominic Cardy ! Les bras nous en tombent un peu. Alors que trois circonscriptions libérales lui tendent les bras, une telle déclaration envoie un très mauvais signal. M. Cardy ne va pas quitter son siège de député. Si Mme Holt attend qu’il le fasse pour sauter sur une (mauvaise) occasion, qui est loin de lui assurer la victoire et la place qui doit être la sienne à l’Assemblée législative, elle finira par rejoindre Kevin Vickers au cimetière des actes manqués.

N'ayant dans notre équipe ni la Sybille de Cumes ni la Pythie de Delphes, nous ne pouvons prévoir si Daniel Guitard et Denis Landry verront leur campagne municipale couronnée de succès. Dans la négative, ils devraient rester députés, à moins qu’ils ne soient vraiment lassés des ors de notre parlement provincial. C’est pourquoi nous encourageons vivement Mme Holt à se présenter dans la circonscription de Dieppe, opportunément rendue disponible par Roger Melanson et facile à conquérir. D’autant plus que c’est dans le sud que le PLNB doit faire des gains, pas dans le nord.

Pour en revenir à Dominic Cardy, nous devons reconnaître qu’il prend fait et cause pour des enjeux qui nous sont chers : l’immersion en français, la modernisation de la loi sur les langues officielles et la réconciliation des communautés linguistiques et culturelles. Il n’y a qu’à relire sa lettre de démission pour s’en convaincre. Nous avons d’autant moins de raison de douter de sa sincérité que cet homme politique, bien que né en Angleterre, est l’un de nos meilleurs francophones à Fredericton. Il incarne ce bilinguisme auquel devrait aspirer nos voisins anglophones mais aussi, espérons-le, l’avenir progressiste des conservateurs provinciaux.

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