La Fin du Monde ! C'est ce que proclame une affiche à Ushuaia, située dans le sud de l'Argentine. Notre objectif est de nous rendre sur le continent de l'Antarctique, dépourvu de toute population permanente, réputé pour être l'endroit le plus froid, le plus sec et le plus venteux du monde, ainsi que le royaume des pingouins et des oiseaux.
Normand A. Léger
Le Moniteur Acadien
Ma fille Julie et moi avons déjà foulé le sol de six des sept continents de la Terre, et il était temps de découvrir le septième : l'Antarctique. Ushuaia, la ville la plus au sud de l'Amérique du Sud, est un port de mer animé, souvent fréquenté par de gros navires de croisière. C'est de là que nous avons embarqué à bord de l'Ocean Endeavor, un petit navire d'expédition pouvant accueillir jusqu'à 200 passagers, en route vers ce continent qui englobe le pôle Sud de la planète.
Pendant notre traversée du redoutable passage de Drake, situé entre l'Amérique du Sud (Cap Horn) et l'Antarctique, nous avons atteint le point de rencontre des océans Atlantique et Pacifique. Ce passage est tristement célèbre pour ses grosses vagues, ses naufrages et ses tragédies maritimes. Avant notre départ d'Ushuaia, on nous a avertis du redoutable « Drake Shake » et nous avons été invités à bien nous préparer.
Vers 3 heures du matin, alors que la plupart des passagers étaient bien éveillés, notre navire a été secoué par des vagues atteignant jusqu'à 12 mètres de haut. De nombreux passagers ont été victimes du mal de mer. Après environ six heures de navigation dans ces conditions tumultueuses, le calme est revenu sur les eaux, et les deux jours suivants se sont déroulés dans des vagues beaucoup plus calmes et acceptables.
Aucun habitant permanent
Après trois jours passés en mer, notre première vision du continent glacé est véritablement impressionnante. Au loin, se dresse un mur de glace blanc, suggérant la présence de rochers imposants sous cette couche glacée massive. L'Antarctique, qui s'étend sur une superficie de 14 107 637 km2, est entouré par les océans Atlantique, Indien, et Pacifique, ainsi que par l'océan Austral.
Notre groupe se compose de personnes aux motivations diverses : certaines sont là pour fouler leur septième continent, tandis que d'autres aspirent à assouvir leur curiosité et à mieux connaître cette région. Alors que l'Antarctique est plus petit que l'Asie, l'Afrique ou l'Amérique, environ 98 % de sa surface est recouverte par une couche de glace dont l'épaisseur moyenne atteint 1,6 km. La morphologie du sous-sol antarctique demeure en grande partie méconnue, mais des éléments comme la présence de lacs et de chaînes de montagnes commencent à se dévoiler.
À l'exception de quelques bases scientifiques, l'Antarctique ne compte aucun habitant permanent. Seuls des organismes végétaux et animaux adaptés au froid, au manque de lumière et à l'aridité y résident, tels que des manchots, des phoques, des poissons, des crustacés, des mousses, des lichens et divers types d'algues. La nuit polaire persiste pendant 24 heures au cours des mois de juillet et août.
Un continent protégé par le droit international
Un traité sur l'Antarctique, signé en 1959 par 12 États et suivi en 1991 par le protocole de Madrid, réglemente les activités sur le continent. Ce traité interdit les activités militaires et l'exploitation des ressources minérales, et établit des accords pour protéger la biodiversité et limiter le tourisme. Le tourisme en Antarctique attire de plus en plus de visiteurs, passant de 10 000 personnes en 2000 à environ 100 000 cette année. La plupart des visites touristiques se déroulent pendant l'été, de décembre à mars, principalement autour de la péninsule Antarctique. Depuis 1991, l'Association internationale des voyagistes antarctiques (IAATO), qui représente 80 % des opérateurs touristiques du continent, a établi un code de conduite visant à promouvoir un tourisme éducatif et à coopérer avec les scientifiques.
Parmi la soixantaine de bases scientifiques érigées en cinquante ans, la base antarctique Bharati, établie en 2012, est la plus récente. L'Antarctique détient le record de la température la plus basse jamais enregistrée sur Terre, avec −93,2 °C mesurés au Dôme Argus le 10 août 2010, tandis que le record de la température la plus élevée a été enregistré le 6 février 2020 à la base argentine d'Esperanza, avec 18,3 °C.
L'Antarctique est un désert glacé où les précipitations sont rares. En hiver, les températures atteignent un minimum compris entre −80 °C et −90 °C à l'intérieur du territoire. Les températures maximales se situent entre 5 °C et 15 °C et sont atteintes près des côtes en été.
La danse des baleines
Notre expédition nous a offert des rencontres extraordinaires avec des baleines, des pingouins, des oiseaux, des phoques et des algues. Des mesures strictes sont mises en place pour éviter la propagation d'insectes et de parasites sur le continent. Depuis notre bateau, des zodiacs assurent le transport des passagers vers la terre ferme. Seuls quelques endroits sont accessibles en raison de la présence de glace et de glaciers le long du littoral. Les eaux calmes permettent également des excursions en zodiac pour observer les baleines, les phoques, les glaciers et bien d'autres choses, ainsi que des balades en kayak.
Les baleines ont été parmi les plus impressionnantes à observer. Nombreuses dans la région pour se nourrir de krill avant leur départ vers l'Amérique du Nord, ces gros mammifères marins ont offert un spectacle inoubliable. Les pingouins, les phoques et de nombreux oiseaux étaient également au rendez-vous. Les glaciers et les icebergs étaient présents, offrant un cadre saisissant et magnifique pour observer les baleines et les phoques évoluant dans leur habitat naturel.
L'Antarctique a toujours été un mystère, un lieu méconnu de nombreux individus. Cette expédition a permis à des scientifiques de poursuivre leurs recherches sur les baleines et les oiseaux. En effet, la queue de chaque baleine est unique, comme nos empreintes digitales. Grâce à cette caractéristique, il a été possible d'identifier certaines baleines ayant été aperçues en Amérique du Nord.
Tous les passagers sont restés à bord du bateau pendant 10 jours, y retournant pour les repas, les activités, les conférences et le sommeil. Chaque jour, nous sortions le matin sur des zodiacs pour explorer des sites différents, puis à nouveau l'après-midi pour découvrir d'autres aspects de ce continent unique. Le voyage aller-retour a duré six jours de navigation, nous laissant quatre jours pour explorer l'Antarctique.
Une mince majorité des passagers a osé participer au saut polaire dans la Baie de Charlotte, bravant une eau à 1,8 degré Celsius. Pour moi, c'était une première, mais une expérience inoubliable qui valait largement le coup. Me promener dans les eaux glacées de l'Antarctique m'a ouvert les yeux sur l'immensité de notre planète, ainsi que sur la diversité de sa faune, de ses poissons et de toute forme de vie qui l'entoure.
