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Odeurs pestilentielles à Beaurivage : la population de Richibouctou réclame des actions concrètes


La frustration populaire a monté d’un cran mardi 20 juin devant l’hôtel de ville de Beaurivage, à Richibouctou. Quelque 150 personnes, dont de nombreux enfants, ont manifesté pour réclamer la fermeture de l’usine Coastal Shell dont les odeurs nauséabondes empoisonnent leur quotidien.

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Damien Dauphin
IJL – Réseau.Presse – Le Moniteur Acadien



«Arrêtez la peste! Arrêtez la peste!» Brandissant des pancartes, des élèves de l’école Soleil-Levant, qui est située à quelques centaines de mètres de l’usine Coastal Shell Products, ont scandé ce slogan devant l’édifice municipal de Beaurivage. Répondant à l’appel lancé par Christian Poirier, un parent d’élèves scolarisés dans cette école, environ 150 personnes sont venues manifester mardi 20 juin avant la réunion ordinaire du conseil municipal.

Beaurivage Hebert Small
(Cathy, Alice et Isabelle Hébert ont manifesté pour retrouver un air pur et sain. Photo : Damien Dauphin)

Située au cœur de Richibouctou depuis 2016, l’usine Coastal Shell infeste le quotidien non seulement de l’école Soleil-Levant, mais aussi de la garderie, d’un foyer de soins, de l’aréna et d’un quartier résidentiel. Le vent diffuse ses odeurs fétides sur des kilomètres à la ronde. C’est donc toute la communauté de Beaurivage qui en respire les atroces effluves.

Cathy Hébert a déclaré au Moniteur Acadien que lorsque l’usine ne tourne pas, il s’en dégage comme une odeur de poubelle très forte, ce qui est déjà très désagréable en soi. Et lorsqu’elle exerce ses activités, elle répand une odeur encore plus épouvantable. Venue momentanément du Québec où elle réside, sa fille Alice en a fait l’expérience au début de la semaine, alors qu’elle était à Rexton.

«Je n’ai jamais couru aussi vite de ma vie dans un magasin», témoigne-t-elle, avant de décrire la puanteur qui l’a violemment incommodée. «Tu prends du vomi, du caca d’une bonne diarrhée, tu mélanges ça avec du poisson pourri, et c’est exactement ce que ça donne comme odeur!»

Employée à la garderie, sa sœur Isabelle confie que certains matins elle n’a pas envie d’aller travailler. À cause de l’odeur. Leur père, Aurèle Hébert, entraîne l’équipe féminine de volley-ball de l’école. Il voudrait que l’usine déménage à 20 ou 30 km, loin de toute habitation, et pas en plein cœur d’une municipalité. Les joueuses de son équipe étaient présentes devant la mairie afin de réclamer un environnement purifié pour exercer leurs activités sportives en toute sécurité. Maman de deux enfants, Milène Bastarache abonde dans le même sens.

«Nous aimerions que nos enfants puissent aller à l’école dans un environnement sain et sécuritaire. Ils ne s’y sentent pas bien, ils ont des nausées. On est là pour faire entendre la voix des enfants, ce sont les citoyens de demain», dit-elle en précisant que, bien qu’elle habite assez loin de l’usine, elle en respire aussi les odeurs pestilentielles. Il lui est impossible de profiter de son jardin par une belle soirée d’été.

La municipalité prend position

Le maire Arnold J. Vautour a discuté à huis clos avec une dizaine de parents avant d’ouvrir la réunion publique ordinaire du conseil municipal. La petite salle du conseil était pleine à craquer. La problématique a été abordée lorsque le public a pu librement interpeller les élus comme le prévoit le dernier point de l’ordre du jour.

Christian Poirier Small
(À l’origine de la manifestation des parents d’élèves, Christian Poirier a pris la parole devant les élus municipaux. Photo : Damien Dauphin)

Le maire voudrait aboutir à un compromis diplomatique et à des solutions pour que la collectivité de Beaurivage et l’usine y trouvent toutes deux leur compte. Cette voie semble difficile à atteindre. Il a expliqué ses démarches auprès du gouvernement provincial et même du District scolaire francophone Sud. M. Vautour et le conseil municipal appuient à 100% les manifestants, mais ils redoutent une possible poursuite judiciaire envers la municipalité si le conseil se prononçait trop clairement sur le sujet.

Un citoyen exaspéré, Stuart Wallace, a laissé exploser sa frustration. «Ne nous dites pas d'être patients. Levez-vous et battez-vous avec nous. Prenez une position forte. Personne ne peut respirer. Faites-les fermer!» (Traduit de l’anglais par nos soins)

Faisant fi des risques de poursuite, la population exaspérée exhorte les élus à prendre une position ferme. Le conseiller Dennis Mazerolle s’est proposé pour représenter le conseil au sein du comité citoyen. De son côté, le maire a évoqué la possibilité de tenir un référendum sur la question afin de recevoir le mandat de la population pour agir. Une autre réunion a suivi mercredi, à l’issue de laquelle il a été décidé que la municipalité allait demander au ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Gary Crossman, d’agir pour faire déménager l’usine.
Le Moniteur Acadien a demandé un commentaire au ministre qui ne lui a pas répondu avant l’heure de tombée du journal.