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Mgr Guy Desrochers : « La prière est au cœur de ma mission d’évangélisation. »
Le nouvel archevêque de Moncton, Mgr Guy Desrochers, a récemment reçu le Moniteur Acadien pour évoquer ses premières semaines d’épiscopat dans le diocèse et sa vision en matière d’évangélisation. Il a mis en lumière ses projets, ses motivations et les défis qu’il envisage de relever pour renforcer la présence spirituelle dans la communauté.
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Damien Dauphin – Le Moniteur Acadien
Bien que né au sein d’une famille catholique, Mgr Guy Desrochers est un converti. Il paraît difficile d’envisager le bienveillant homme d’Église comme un jeune homme dans le style de James Dean dans le film «Rebel Without a Cause» (La fureur de vivre). Et pourtant ! Le prélat explique que, pendant une dizaine d’années, il s’était éloigné de la religion. Cette traversée du désert avait commencé lorsqu’il était adolescent.
Très proche de son papa qui souffrait de graves problèmes cardiaques, le jeune Guy était tourmenté à l’idée de le perdre et s’interrogeait sur le sens de la vie. Sa maman lui avait offert une Bible qu’il avait refusé de toucher pendant un an, laissant la poussière s’accumuler sur le livre sacré. Alors que le chirurgien qui devait opérer son père a laissé entendre que celui-ci avait peu de chances de sortir vivant du bloc opératoire, Guy a entendu une voix intérieure lui murmurer à trois reprises qu’il trouverait dans les évangiles les réponses à ses questions existentielles.
«Au bout d’un moment, j’ai ressenti un feu dans mon cœur. Jour après jour, j’ai trouvé les réponses que je cherchais sur le sens la vie.»
L’immersion biblique de Guy Desrochers a eu une incidence miraculeuse sur l’état de santé de son père. Alors qu’il l’avait donné perdu d’avance, son chirurgien a reconnu que finalement il avait été le plus chanceux de tous les patients opérés et que son quadruple pontage était une réussite. Rétrospectivement, Mgr Desrochers y voit les effets de la puissance de la prière.
Écoute et dialogue
Rédemptoriste, il fut ordonné le 7 janvier 1989. L’année même, il a proposé un projet pour que trois jeunes et un plus vieux aillent rejoindre les gens dans les domiciles, les bars, les restaurants, les écoles, les soirées sociales et même les centres de toxicomanie.
«Je suivais vraiment les préceptes du Seigneur quand il disait : allez dans le monde entier, de toutes les nations faites des disciples. On ne reste pas assis en attendant que le monde vienne nous voir pour recevoir un sacrement. La vocation, c’est plus que ça. On imprègne le tissu social lentement mais sûrement, et non pas d’une façon agressive. Il faut faire comme les anciens missionnaires qui, lorsqu’ils arrivaient dans un pays étranger, commençaient par apprendre la langue locale. L’évangélisation, c’est aimer les peuples et partager leur bonheur.»
Dans l’archidiocèse de Moncton, Mgr Desrochers entend mettre en pratique ce qu’il faisait dans le diocèse de Pembroke : s’inscrire dans la démarche synodale proposée par le pape François en consultant les parties prenantes. Il estime que l’Église n’est pas une structure hiérarchique mais que tout le monde a reçu des dons de l’esprit pour apporter sa pierre à l’édifice. La première phase de son projet d’évangélisation sera centrée sur la prière mais aussi l’écoute mutuelle.
«La prière n’est pas un monologue, c’est un dialogue avec Dieu. Il faut apprendre à faire des moments de silence. À un moment donné, il faut que cesse le bavardage et nous recueillir pour laisser écouter le Seigneur Jésus et le laisser nous répondre pour discerner ce qu’Il veut que nous fassions. C’est ça que je veux proposer aux gens.»
Des maisons missionnaires dans les communautés
À Pembroke, Mgr Desrochers s’était inspiré d’un exemple anglophone appelé theology on tap. Il s’agit d’une évangélisation de rue, dans le cadre de laquelle il allait à la rencontre du public, principalement des jeunes. Reconnaissant que tout semble aller de plus en plus mal dans une société occidentale qui a évacué la dimension spirituelle, il tentera de ramener les gens vers la foi comme il en fit lui-même l’expérience avec ses frères et sœurs.
«La plus grande souffrance dans la vie des gens, c’est le manque d’amour. On est trop centré sur soi-même. Je veux remettre Dieu dans la vie des gens pour que ça aille mieux.»
Dans deux ans, la deuxième étape du projet concernera le plan de restructuration du diocèse en fonction du nombre de prêtres qui seront encore présents dans cinq et dix ans. Chaque doyen préparera un rapport et un projet pour son secteur. S’agissant d’éventuelles fermetures d’églises dans la région, l’archevêque de Moncton veut être réaliste. Déjà ancienne mais accentuée par la pandémie, la diminution de la pratique religieuse menace la pérennité de certains lieux de culte.
Mgr Desrochers réfléchit à des projets pour contrebalancer cela. Dans chaque région où une église devra fermer, il envisage d’ouvrir ce qu’il appelle une «maison missionnaire catholique» et en livre le principe directeur. Une fois par semaine, un laïc met sa maison à disposition pour inviter des gens à s’y réunir et à prier. «Cette maison-là deviendrait un phare pour la présence de Dieu. Un prêtre pourrait s’y rendre une fois par mois pour y dire la messe. On verra dans le futur quelle forme ça va prendre. De là, d’autres initiatives pourraient jaillir pour propager la foi», conclut l’archevêque de Moncton.